Ce téléfilm est un petit bijou ! Je l'ai adoré. The Gambling Man réunit toutes les qualités pour nous intéresser, nous tenir en haleine jusqu'à la fin et nous faire vibrer d'émotions. Loin d'une simple romance sur fond historique, il s'agit d'une histoire forte très attachante, où se mêlent drames humains, séquences choc, intrigues et rebondissements. C'est le destin tragique d'un homme dans une époque où tout est possible, le meilleur comme le pire.
Magnifique étude de caractère, il dépeint la personnalité de Rory Connor, son évolution au fil de l'existence et des événements - magnifié grâce à l'interprétation remarquable de Robson Green, totalement convaincante. Parfait dans ce rôle, Robson apporte subtilité et sensibilité à son personnage. Robson montre toutes les nuances et la complexité du portrait de Rory : le jeune homme flirtant avec sa petite amie, le garçon égoïste capable de vol et de tromperie, le joueur acharné jusqu'aux pires conséquences, le travailleur dévoré d'ambition et désireux de s'en sortir, sa conscience de classe aigue et sa capacité à agir, le gentleman éduqué et raffiné, l'époux tendre et attentionné, sincèrement épris de sa seconde femme.
Rory connait un parcours cahotique jusqu'à sa totale et ultime rédemption au prix du sacrificede sa vie.
Car malheureusement, certains ne souhaitent pas qu'il réussisse pour une raison ou une autre, intérêts d'argents, de vanité, de caste ou de cœur...
La vengeance est un thème omniprésent. Les scènes de violence sont terribles. La séquence du passage à tabac avec l'acharnement sur le malheureux Rory est terrifiante. La tragédie finale est également très impressionnante, totalement effrayante de réalisme dans l'enfer des flammes. Ces reconstitutions et les maquillages impressionants apportent une grande véracité. Le sort de Rory émeut profondément.
Le film offre une magnifique galerie de portraits avec la part importante accordée aux femmes. Sylvestra le Touzel incarne une superbe Charlotte, amoureuse jusqu'à l'idolâtrie, sincère et bouleversante. Avec retenue et patience, Charlotte, plus âgée que lui, fait l'éducation de Rory. Elle lui apprend à devenir adulte, lui enseigne sagesse et sens du devoir, et lui fait découvir les vraies valeurs de la vie. Rory apprend à l'aimer car elle n'inspire qu'amour profond et généreux. Après sa mort, Charlotte retrouve dans son fils, le souvenir de son amour.
Le personnage de Janie est fort et riche, Stephanie Putson joue avec justesse la jeune fille amoureuse du beau Rory, sa jeune épouse qui connait joies puis peines, et cette créature métamorphosée à l'esprit troublé, restée fidèle à son premier amour. On compatit au drame de sa situation.
Les personnages des "méchants" sont aussi très crédibles, les sbires au menton fuyant et regard cruel et leur chef, figurant ce qui est de plus abject et corrompu chez l'être humain. Heureusement, il existe une certaine morale car tous seront punis.
Tyne Tees Television a produit ici une adaptation fidèle à l'œuvre de Catherine Cookson, d'une grande qualité d'écriture et d'esthétisme, comme savent exceller les productions anglaises en la matière.
L'ambiance est magnifiquement reconstituée et nous plonge dans le South Shields du 19ème siècle au Nord Est de l'Angleterre dans le comté de Tyne and Wear. L'authenticité des lieux, des scènes de la vie courante, de la misère des bas-fonds contrastant avec l'opulence des classes aisées, l'atmosphère des scènes de rue - ruelles brumeuses à peine éclairées, ombres déformant des visages pathétiques, drame de la misère - évoquent les conditions sordides du Tyneside de cette époque.
On pénètre également dans l'univers du Poker, avec de nombreuses parties de cartes au début du film (mais rien à voir un film tel que L'arnaque, California Split ou Les Joueurs...). La caméra fait le tour de la table des joueurs, passe en gros plan d'un visage à un autre, scrute les mains et les échanges de regards, la tension est tangible jusqu'au paroxisme de la mise décisive.
La fin est bouleversante, émouvante aux larmes avec la mort de Rory de ses terribles brûlures. On aurait tellement souhaité qu'il connaisse le bonheur et la vie heureuse, enfin méritée, avec sa femme et son fils. La dernière image est très belle offrant du réconfort après le drame. Charlotte, la mère de Rory et l'enfant qui porte son prénom, réunis sur sa tombe, s'éloignent tous les trois main dans la main. Le signe d'une réconciliation sociale et l'espoir d'un avenir meilleur.